A travers cet article, nous voulons montrer les implications d’une gestion basée sur les rééquilibrages automatiques. Cette technique consiste à vendre les fonds qui ont grimpé relativement au portefeuille et acheter ceux qui ont baissé pour maintenir votre portefeuille ajusté au portefeuille modèle qui correspond à votre profil investisseur. Bien que cette technique effectue les rééquilibrages avec raison, parfois elle peut générer des doutes auprès des investisseurs, surpris que celle-ci achète des fonds qui ont baissé. Ces derniers sous-entendent que parce que les fonds ont baissé, il est probable qu’ils continuent de baisser.
1. Poursuivre le marché est une mauvaise stratégie
Ce biais est très habituel, les chercheurs en finance comportementale (« behavioral finance ») l’ont nommé : « poursuivre le marché » (« Chasing the market ») ou aussi « différence à cause du comportement » (« behavioural gap »). Poursuivre le marché signifie que nous avons tendance à maintenir les positions gagnantes plus que nécessaire et à vendre celles perdantes avant l’heure. En réalité, ce n’est qu’une manifestation du comportement que nous connaissons depuis que nous sommes petits : nous apprenons par l’expérience et nous pensons que les rentabilités futures seront similaires à celles passées et récentes. Cependant, dans le monde des investisseurs, les échecs d’aujourd’hui ne font que semer les graines du succès de demain.
Malheureusement, ce biais diminue beaucoup la rentabilité des investisseurs sur le long terme et la réduit d’une manière très curieuse : il fait dévier votre profil de risque vers un profil plus risqué qui quand les pertes surviennent (elles surviendront un jour ou l’autre), elles vous frappent avec un portefeuille surexposé à un petit nombre de classes d’actif généralement très corrélées entre-elles (puisque les positions perdantes ont été vendues). Dans ce portefeuille, aucune classe d’actif ne peut vous protéger des baisses et vous finissez par subir une perte largement supérieure à celle que vous pouvez assumer. Quand les pertes deviennent excessives par rapport à votre profil investisseur, beaucoup optent pour vendre, avec la matérialisation des pertes, et se privent des bénéfices d’une reprise à venir qui se produit forcément à un moment donné.
2. Les investisseurs ne rééquilibrent pas leurs portefeuilles
Dans son livre Unconventional Success, A Fundamental Approach to Personal Investment, David F. Swensen, investisseur bien connu et actuel directeur des investissements de la fondation de l’université de Yale, illustre cet effet avec le comportement des investisseurs après le krach boursier de 1987.
Composition moyenne des portefeuilles | Actions | Obligations | Espèces | Autres |
---|---|---|---|---|
Pondération sept. 1987 (avant le krach boursier) |
28,4% | 30,4% | 37,1% | 4,1% |
Pondération oct. 1987 (après le krach boursier) |
21,9% | 32,3% | 42,1% | 3,8% |
Comme nous pouvons le voir, les investisseurs ont réduit la proportion de leurs investissements en actions après le krach boursier. L’auteur ajoute qu’ils ont attendu plus de 4 ans pour revenir à la pondération d’avant la chute boursière dans leurs portefeuilles.
Nous pouvons observer le même comportement après l’éclatement de la bulle internet de l’an 2000. Pour illustrer ce point, dans le même chapitre du livre, l’auteur utilise les données de 16 mille investisseurs dans des fonds de pension TIAA (Teachers Insurance and Annuity Association of America, voir la note 1 en fin d’article) pour analyser comment, individuellement, ces investisseurs ont changé leur exposition aux actions et aux obligations tout au long des années 1992-2003 (ces fonds permettent d’augmenter ou de diminuer à volonté la pondération des actions). Le résultat peut s’analyser à travers le graphique suivant :
En moyenne les investisseurs ont commencé avec un profil 50% actions et 50% obligations. Avec le marché haussier des années 1995-1999, ils n’ont pas modifié leurs apports, ni rééquilibré leurs portefeuilles, ainsi par pur effet de marché, ils sont passés à une pondération de 68% en actions, juste avant que ne commence le marché baissier et à la fin de la période baissière, ils sont revenus à 50% en actions. Par conséquent, à ne pas rééquilibrer, les investisseurs ont laissé le marché faire l’affectation stratégique de leurs actifs. Pendant ces 10 années, la rentabilité annuelle obtenue par les investisseurs a été de 8,4%, et la rentabilité cumulée sur cette période a été de 123%.
Swensen fait la réflexion et le calcul suivant : quelle rentabilité auraient obtenu les investisseurs s’ils avaient investi depuis le départ 68% de leur portefeuille en action et avaient rééquilibré annuellement leur portefeuille pour maintenir constamment cette proportion de 68% d’actions ? Ce portefeuille aurait eu un risque très proche d’un portefeuille ayant une pondération de 50% mais qui non rééquilibré, a augmenté jusqu’à 68%.
Le résultat est qu’avec un risque similaire, le portefeuille rééquilibré annuellement aurait obtenu une rentabilité supplémentaire de +0,4 point de pourcentage à l’année, soit 10 points de pourcentage de plus sur la rentabilité cumulée sur 10 ans par rapport au portefeuille sans rééquilibrage. C’est-à-dire, qu’avec un risque similaire, une rentabilité largement supérieure aurait pu être obtenue.
Impact des rééquilibrages sur la rentabilité des portefeuilles | Rentabilité annuelle | Rentabilité cumulée |
---|---|---|
Portefeuille sans rééquilibrage, pondération initiale 50% actions, pondération maximale 68% | 8,4% | 123% |
Portefeuille avec rééquilibrage pondérations 68% actions | 8,8% | 133% |
Bénéfice des rééquilibrages | +0,4% | +10% |
3. Comment expliquer cette rentabilité supplémentaire grâce aux rééquilibrages ?
Le rééquilibrage automatique est un exemple d’investissement contraire (« contrarian investing »). Quand vous rééquilibrez votre portefeuille, ou bien vous achetez des actifs qui ont baissé et qui, par conséquent, sont en disgrâce, sont moins demandés, ou bien vous vendez des actifs qui ont grimpé, qui sont à la mode et que moins d’investisseurs veulent vendre. Vu d’une autre manière, plus en accord avec l’efficience des marchés : quand vous rééquilibrez votre portefeuille, vous achetez des actifs qui ont baissé et par conséquent qui ont une « prime de risque » supérieure qui devrait être compensée à long terme. Cela signifie que les crises financières sont généralement accompagnées de crises économiques dans lesquelles les investisseurs ont moins d’argent, espèrent donc en obtenir moins, leurs actifs sont dépréciés, et il reste donc moins d’acheteurs potentiels. Et inversement.
4. Pourquoi tout le monde n’effectue alors pas des rééquilibrages ?
La question qui devrait maintenant surgir, si cela est si évident, pourquoi tout le monde ne le fait-il pas ? Malgré le fait que le rééquilibrage soit apparemment un mode de gestion assez simple à effectuer, notre expérience nous montre que dans les faits les gestionnaires professionnels tendent à faire justement le contraire : quand un actif baisse relativement, ils vont difficilement l’acheter. Normalement, ils le maintiendront et souvent ils le vendront. Pourquoi ? Car ce sont des gestionnaires qui ne veulent pas perdre leurs clients, et si un actif baisse et que le client est mécontent, le plus simple est de ne pas s’opposer à lui et de vendre l’actif.
De plus, dans un marché baissier, les revenus des gestionnaires baissent, de par leur patrimoine et car les clients changent (à tort) vers des investissements plus conservateurs qui laissent moins de marge. En conséquence, les gestionnaires deviennent plus court-termistes dans leur relation avec le client et la priorité devient de ne pas perdre de clients, bien que cela engage de mauvaises décisions à moyen terme.
5. Conclusion
Rééquilibrer périodiquement les portefeuilles pour le maintenir proche du portefeuille modèle établi pour le long terme joue un rôle crucial dans le processus de gestion. Normalement, les investisseurs ne sont pas en mesure de rééquilibrer leur portefeuille, par manque de temps ou bien par convictions erronées. Un gérant automatisé, comme Indexa, simplifie beaucoup ce processus en automatisant les révisions et les rééquilibrages pour que tout soit plus simple : le système compare au quotidien les pondérations réelles des actifs du portefeuille avec les pondérations objectives. Quand un fonds est suffisamment au-dessus de son poids objectif dans le portefeuille et un autre est suffisamment en dessous de son poids objectif, nous générons automatiquement un ordre de vente partiel du fonds qui est au-dessus de son poids objectif et ensuite un ordre d’achat de parts du fonds qui était en dessous de son poids objectif.
6. Les rééquilibrages automatiques chez Indexa
Nous révisons les portefeuilles automatiquement tous les jours et les rééquilibrons en cas de déviation supérieure à un seuil déterminé, qui est actuellement de +-2,5 points de pourcentage pour les portefeuilles de moins de 100 mille euros et de 1,5 point de pourcentage pour les portefeuilles de plus de 100 mille euros). Vous trouverez plus d’information à ce sujet sur notre page des questions fréquentes « Rééquilibrages automatiques des portefeuilles de fonds »
Note 1 : Le Teachers Insurance and Annuity Association of America-College Retirement Equities Fund (TIAA, avant TIAA-CREF), est une organisation de services financiers dans les domaines académique, de la recherche, de la médecine, de la culture et gouvernementaux. TIAA preste des services à plus de 5 millions d’employés actifs et à la retraite qui prennent part à plus de 15.000 institutions et a plus de 1.000 millions de dollars en actifs (au 31 décembre 2017).